Après s'être hissée sur le lit du jeune homme pour ouvrir la fenêtre, Anastassia retrouva le sol dur de la chambre sous ses pieds. Sans même s'être éloignée de ce que James semblait considérer comme son « territoire », l'adolescente retira ses baskets d'un geste rapide du pied avant de les envoyer choir à l'autre bout de la chambre, face à son lit. Sans accorder un seul regard à son parrain, Anastassia s'approcha de ses affaires. Elle se trouvait confrontée à un affreux dilemme : elle brûlait d'envie de ranger toutes ses affaires à l'intérieur de son placard qu'elle fermerait ensuite à double tour, mais en même temps, elle répugnait à l'idée de sortir de son sac ce qui lui appartenait, laissant ainsi à James l'occasion d'en apprendre un peu plus sur elle. Après tout, ce que les gens mettent dans leur valise révèlent souvent une partie de leur personnalité ... Quoique, dans le cas d'Anastassia, on ne pouvait pas vraiment dire cela puisque c'était sa mère qui s'était chargé de remplir sa valise ; mais d'un autre côté, c'était Anastassia qui lui avait demandé - pour ne pas dire ordonner - de prendre ceci plutôt que cela. Certes, il n'y avait pas toutes les choses qu'auraient prises Anastassia si elle avait préparé ses affaires elle-même, mais excepté l'alcool, les cigarettes et quelques autres objets peu recommandés, il y avait tout ce que désirait l'adolescente. Alors ? Prenait-elle le risque de laisser ses affaires à la portée de n'importe qui - en imaginant que quelqu'un serait assez imprudent pour oser pénétrer dans SA chambre sans son consentement - ou plutôt celui d'apporter des informations personnelles à son parrain ? Certes, sa valise ne recelait pas de grands trésors, mais rien qu'à l'idée de voir cet idiot observer ne serait-ce qu'un de ses tee-shirts, elle devenait folle. *Vite. Faut que je me décides là, s'il me voit hésiter pendant ne serait-ce qu'une minute je lui donne l'avantage* songeait-elle tandis qu'elle arrivait tout près de ses affaires. *Allez Ana' décide toi ... VITE !* La jeune fille venait de prendre une décision lorsque le ton ironique de James lui fit suspendre son geste. L'adolescente ne fit pas le moindre geste ; elle ne chercha même pas à ramener son bras auprès de son corps ; elle le laissa suspendu dans le vide, prêt à saisir son sac. Elle écoutait, silencieuse et attentive les « menaces » de son nouveau parrain.

Monsieur voulait jouer au plus malin !? Anastassia sentait cette petite lueur de colère grandir en elle tandis que le jeune homme laissait les mots sortir de sa bouche. Il pensait vraiment qu'elle allait le laisser s'imposer comme ça !? Et pire, comment osait-il parler de sa mère !? Certes, Anastassia détestait ses parents et leur en voulait énormément, mais elle n'autorisait personne d'autre qu'elle à les critiquer aussi ouvertement. Bon d'accord, James s'était contenté d'une petite remarque concernant l'éducation, mais c'était déjà trop ! Quelqu'un d'autre aurait prononcé ces paroles, Anastassia n'aurait pas relevé. Mais là, c'était différent. Elle avait face à elle - quoique dans la situation actuelle, derrière, serait plus approprié - un pauvre garçon complètement abruti par sa prétention, incapable d'imaginer qu'il pouvait avoir à faire à un adversaire à sa taille, pour ne pas dire encore plus « puissant ». Et oui, Anastassia avait confiance en ses capacités ; elle en avait terrorisé plus d'un et c'était sortie de bien des situations compliqués, et ce, elle devait bien l'avouer, en partie grâce à ses idées surprenantes et son imprévisibilité. En effet, prévoir comment agira la jeune fille est totalement impossible ; elle peut très bien mettre son poing au milieu du visage de James tout comme elle est capable de l'ignorer, ou pire, si jamais elle a pris un coup sur la tête, elle ira, pourquoi pas, lui proposer de lui payer un café. Mais là, face à l'assurance du jeune homme, elle ne pouvait que répondre par la violence et l'agressivité. Quoique, l'indifférence n'était pas une mauvaise solution non plus ... Mais Anastassia avait bien envie de se défouler après les cinq heures qu'elle avait perdu, enfermée dans le bureau d'Hurston. Et puis ... ce n'était pas un petit idiot qui allait lui faire peur ; elle avait bien l'intention de le lui prouver. Quelques instants auparavant, la jeune fille avait décidé de ne pas engager les hostilités ; elle venait de changer d'avis. James voulait la guerre ? Il n'allait pas tarder à l'avoir. Seulement, Anastassia préférait commencer en douceur ... après tout, elle n'avait pas envie d'être accusé de meurtre si Monsieur ne supportait pas de la voir dominer la situation ...

Anastassia était sur le point de mettre son plan à exécution, mais tandis qu'elle s'apprêtait à regagner la sortie de la chambre, elle entendit le battant de la fenêtre se refermer. La jeune fille stoppa son geste et se retourna brusquement, dans un geste rapide et contrôlé. Elle était face à James, à son regard malicieux et à son sourire séduisant ... face à un visage qu'elle avait envie de cogner jusqu'à ce qu'il ne soit plus reconnaissable. Ce côté lui appartenait !? Cette fois, c'est sur le visage d'Anastassia qu'un sourire moqueur se dessina. « Je comprends que tu puisses te sentir obligé de marquer ton territoire ... » laissa-t-elle échapper doucement d'entre ses lèvres, d'une voix emplie d'ironie où l'on percevait malgré tout une pointe de menace. Tout en faisant les cent pas dans la pièce à une allure extrêmement lente, prenant soin de ne pas dépasser la barrière invisible que lui avait présenté James, Anastassia ne quittait pas le jeune homme des yeux. Elle patienta quelques secondes avant de poursuivre « Je ne m'oppose pas vraiment à cela étant donné que j'ai le nez bouché, mais pour évite que je marche dedans, ça serait prévenant de ta part de me signaler l'endroit où tu as fait tes besoins. Tu sais, comme les chiens quand ils ont envie de montrer qu'on est chez eux ... » Le visage de la jeune fille était indéchiffrable. Excepté le son de sa voix, elle affichait un air si sérieux qu'on aurait pu croire qu'elle croyait vraiment à ce qu'elle disait ; et qu'elle attendait réellement une réponse ...